Sandman, Netflix
Avant d’être une série portée par Netflix, Sandman était un roman graphique de Neil Gaiman publié dans les années 1990. Voilà qui avait d’emblée de quoi attirer mon attention : l’auteur prolifique a toujours le don pour signer des œuvres fantastiques originales et qui peuvent donner d’excellentes adaptations en série, comme American Gods a pu en témoigner. Bonne pioche : les dix épisodes de la première saison sont réjouissants par leur capacité à jouer avec des personnages ou concepts bien connus, mais en leur offrant un point de vue décalé qui les rend plus intéressants. Même si la série de Netflix souffre de quelques défauts, elle est particulièrement plaisante et donne envie d’en voir plus.
Autant commencer par les défauts : Sandman souffre à mon sens principalement de sa volonté de trop en faire. J’imagine la complexité du roman graphique sorti de l’imagination fertile de Neil Gaiman, mais les scénaristes auraient mieux fait de se concentrer sur un moins grand nombre d’intrigues notamment secondaires. Alors qu’elle n’est composée que de dix épisodes, cette première saison pourrait durer le double, voire le triple, si chaque arc narratif avait droit au même traitement. En l’état, on a des épisodes presque indépendants et des personnages qui ne font que passer. C’est assez déroutant, mais il faut noter qu’Allan Heinberg le fait bien. L’un des épisodes les plus réussis de la saison est d’ailleurs une de ces capsules, quand la série se bloque le temps d’un épisode sur un seul restaurant où un personnage manipule tous les clients pour les obliger à ne jamais mentir. Malgré tout, Lucifer est sous-exploité tout comme Désir, le frère de Rêve qui devrait jouer un plus grand rôle dans une future saison, mais qui semble ici débarquer comme un cheveu sur la soupe.
Cela étant, la création de Netflix est sauvée pour moi par sa générosité et l’originalité de son point de vue. Neil Gaiman exploite jusqu’au bout ses postulats de départ et son œuvre regorge de bonnes idées et de clins d’œil bien trouvés, avec de multiples pieds de nez à la culture dominante qui font bien plaisir. Mention spéciale à la place Saint-Pierre reconvertie en enfer, mais j’ai aussi beaucoup apprécié le concept de collecteurs pour ces tueurs en série qui se retrouvent dans des conventions où ils échangent sur leurs expériences. La série Netflix joue aussi la carte de la diversité avec délice, tant raciale que sexuelle, ce qui ne manque pas d’énerver les esprits chagrins et de la rendre d’autant plus attachante.
J’espère que Sandman pourra poursuivre avec une deuxième saison, car cet univers riche et original mérite bien d’être creusé. Si la suite pouvait se concentrer sur moins de personnages et d’intrigues secondaires, ce serait parfait et le dernier épisode semble justement aller dans ce sens. Une bataille entre infinis, avec les humains au milieu probablement et Dieu qui pourrait vouloir intervenir : voici un programme alléchant !