Neumatt, SRF 1

Neumatt, SRF 1

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Neumatt, une série suisse diffusée par Netflix dans nos contrées, m’a surpris par sa densité. Dès le premier épisode qui commence avec le suicide d’un agriculteur endetté et le retour de mauvaise grâce de son fils qui avait tout fait pour quitter ce milieu, la création de SRF 1 m’avait happé et elle ne baisse pas de rythme avant la fin de sa première saison. Les scénaristes ont des dizaines d’idées pour ne laisser aucun temps mort et faire exploser cette famille qui vit depuis des années dans la rancœur et les mensonges. Ce dispositif n’a rien de gratuit toutefois, bien au contraire : Marianne Wendt a créé une galerie de personnages complexes et donc crédibles, ce qui lui permet d’aborder de nombreux sujets tout en leur laissant une vraie place pour évoluer. Malgré tout, la liste de péripéties et retournements de situation est impressionnante pour cette série qui semblait plutôt réaliste au premier abord. Je ne vais rien divulgâcher, naturellement, mais je ne m’attendais clairement pas à un tel rythme et à une telle intensité scénaristique.

L’épaisseur psychologique de tous les personnages, principaux comme secondaires, est assez bluffante, surtout quand on pense à la durée assez courte de cette première saison. Neumatt n’a pas besoin d’une longue durée d’exposition pour créer des personnalités réalistes, avec leurs certitudes et leurs contradictions. Le personnage de Michi est très intéressant et impeccablement incarné par Julian Koechlin : il a tout fait pour quitter la ferme familiale et devenir un homme aussi éloigné que possible de son père. Quand la série commence, il est une caricature de business man, il roule dans une grosse Audi, porte des costumes hors de prix et se vante constamment de son salaire. Mais ce fêtard qui carbure à la cocaïne a un parcours bien plus intéressant que ce qu’il laissait entendre initialement, avec une relation bien plus complexe qu’escompté à la ferme familiale. Jusqu’au bout, il reste impulsif et égoïste, mais ses faiblesses transparaissent aussi, notamment dans sa relation avec un collègue ou dans son histoire d’amour d’adolescence avec celui qui est devenu le vétérinaire du village, désormais marié et père de famille. Son frère Lorenz est une sorte d’inverse, il adore la ferme et surtout s’occuper des animaux, mais il gère très mal la pression et échoue face à un examen absurde où on lui demande de ressortir de la propagande grossière pour l’agriculture productiviste. Sa sœur, toujours traumatisée par son histoire difficile, peine à trouver une place dans cet environnement très masculin. Et sa mère, une agricultrice modèle qui ne rêve que de fuir. Ils sont tous justes et attachants avec leurs défauts, et c’est indéniablement le plus gros succès de Neumatt.

SRF 1 a renouvelé sa série pour une deuxième saison et je suis très curieux désormais de voir ce qui nous attend. Ces huit premiers épisodes sont passés à toute allure grâce à un scénario rythmé et surtout des personnages crédibles et attachants. J’espère que le scénario osera encore davantage aller sur le terrain agricole, en interrogeant par exemple la cruauté inhérente à la production laitière ou encore en évoquant la question du réchauffement climatique dans cet écosystème. Quoi qu’il en soit, je serai au rendez-vous, car cette saison de Neumatt est une belle réussite.

Informations

Année : 2021

  • Nationalité :
  • Suisse
  • Genre :
  • Drame

Durée : 8 épisodes de 46 minutes