
Le Robot sauvage, Chris Sanders
Par bien des aspects, Le Robot sauvage est un classique de l’animation pour toute la famille, avec des animaux qui parlent en guise de protagonistes et une intrigue centrée autour de l’éducation d’un petit par sa mère. Par bien des aspects aussi, le long-métrage réalisé par Chris Sanders est bien plus original qu’il n’en a l’air, avec son univers de science-fiction dystopique assez inattendu et son personnage principal qui est… un robot. C’est tout l’intérêt du film et la clé pour comprendre son succès, tout à fait mérité d’ailleurs. Cette adaptation d’une trilogie de Peter Brown est tout à la fois traditionnelle et novatrice, un savant mélange entre les recettes d’antan et la modernité qui se retrouve déjà dans le style. DreamWorks Animation a opté pour un dessin un petit peu brouillon, bien loin du photoréalisme qu’on avait l’habitude de croiser et plus proche finalement des films d’animation du siècle dernier. Le cinéaste évoque volontiers Bambi et Mon voisin Totoro en guise d’inspirations et cela se ressent. Il y a un côté old-school qui n’est pas déplaisant du tout, même si l’animation conserve la fluidité parfaite permise par l’ordinateur. Un compromis qui n’est pas nouveau, mais que je trouve toujours aussi plaisant et qui est ici particulièrement réussi.
Le fond est également convaincant, même si je m’attendais peut-être à une histoire au fond plus adulte. Le Robot sauvage est assez surprenant d’ailleurs à cet égard, avec une vision de la sauvagerie naturelle que je n’imaginais pas retrouver ici. À un moment, assez tôt dans le film, un bébé se fait (presque) manger pendant que sa mère listait le nombre d’enfants, ce qui est à la fois une bonne vanne et j’imagine assez perturbant pour un jeune public. La rencontre même entre le robot Roz et le petit oisillon se fait suite à la mort de la mère oie et de toute la portée, ce que le scénario ne manque pas de rappeler à plusieurs reprises : là encore, c’est amusant et potentiellement traumatisant. Dans le même temps, on reste sur une histoire très simple et assez enfantine, j’ai trouvé. J’ai beaucoup apprécié la dystopie par petites touches discrètes, comme lorsque l’on survole le Golden Gate Bridge submergé, et l’absence de toute information sur ce qui s’est passé est bienvenu, le scénario n’est pas centré sur les humains après tout. J’aurais peut-être davantage apprécié une intrigue plus complexe, comme la fin le laisse entendre, au lieu de la vision soudainement très angélique où tous les animaux de la forêt se mettent d’accord pour ne plus se manger et vivre ensemble en toute confiance. Brutalement, on revient dans la nature à la Disney, sans sauvagerie et au pire avec quelques chamailleries. Alors, c’est mignon tout plein, certes, mais le décalage avec le début est assez troublant.
Le Robot sauvage semble ainsi avoir un petit peu de mal à choisir entre deux publics et ne parvient pas tout à fait à satisfaire les enfants ni les adultes. Pixar aurait sans doute opté pour un traitement différent et je crois que j’aurais préféré, ce qui ne veut pas dire que le film de Chris Sanders est raté pour autant. Visuellement magnifique, ses personnages sont bien écrits et j’ai apprécié l’équilibre entre humour et émotion. En somme, c’est un très bon film d’animation, sans être un chef-d’œuvre.