Godzilla Minus One, Takashi Yamazaki

Godzilla Minus One, Takashi Yamazaki

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Dire que cette créature fascine est encore loin du compte : Godzilla Minus One est le trente-septième film à la mettre en scène et c’est sans compter toutes les autres représentations à la télévision, sur papier ou ailleurs. Dire que je trouve cela lassant est un euphémisme, surtout avec les variations américaines récentes où le lézard japonais affronte King Kong, mais quel ennui. En revenant aux origines pour les soixante-dix ans de Godzilla, Takashi Yamazaki parvient pourtant à trouver le ton juste et le cinéaste japonais propose un blockbuster délicieusement rétro et surtout diablement efficace, sans multiplier inutilement l’action. C’est un film à l’ancienne qui fonctionne parfaitement bien dans une ère des projets toujours plus énormes, un retour aux sources qui m’a rappelé dans l’esprit Alien: Romulus. Même si vous n’aimez pas spécialement Godzilla, cette version vaut le détour.

Première bonne idée, l’action se déroule dans le Japon de l’après guerre et Godzilla Minus One débute même quelques jours avant la signature de l’armistice, en 1945. Contrairement à d’autres réalisateurs qui essayaient de faire monter la tension en ne présentant pas la créature trop rapidement, Takashi Yamazaki revendique le genre de son film et introduit très vite son Godzilla, qui s’inspire assez directement de celui imaginé par Ishirō Honda dans le long-métrage qui a inventé le monstre. C’est une version moins « réaliste », avec son regard humanisé, et on pourrait presque croire qu’il s’agit d’une marionnette en stop-motion, même si tout est numérique, évidemment. À ce sujet, il faut saluer les effets spéciaux, qui donnent l’impression de voir un gros budget américain, alors que le film aurait été produit avec nettement moins d’argent, on parle d’une dizaine de millions, pas quelques centaines comme c’est désormais la norme à Hollywood. Malgré tout, ce « petit » budget ne se ressent pas, grâce à un usage malin des effets visuels. Plus qu’une bonne maîtrise technique, c’est un bon sens de la mise en scène qui ressort ici et le spectacle est bien au rendez-vous malgré tout.

L’autre concept fort du projet, c’est de rester ancré sur le point de vue des citoyens, au lieu d’adopter celui des militaires et du gouvernement comme c’est toujours le cas dans ce genre de film catastrophe. D’ailleurs, Godzilla Minus One revendique au contraire une méfiance, voire un rejet net, du gouvernement, qui échoue lamentablement à arrêter la bestiole et qui cède finalement la place à une solution citoyenne. J’ai trouvé cela intéressant, même si on peut aussi y lire une vision populiste hélas bien trop présente dans nos sociétés modernes. Je ne crois pas que c’était nécessairement l’intention du réalisateur, qui a aussi signé le scénario, en tout cas, ça ne colle pas pour moi avec sa position sur les kamikaze pendant la guerre. C’est un axe majeur, j’ai même été étonné par l’ampleur de cet arc narratif, et c’est intéressant d’accorder autant de place au sujet. La honte ressentie par les pilotes qui ne se sont pas tués comme on leur a ordonné est aussi projetée par les survivants et Takashi Yamazaki associe adroitement le traumatisme de la guerre avec ce sentiment fort chez son personnage principal. J’ai aussi bien aimé la famille recomposée qui n’est pas bêtement une intrigue romantique, tout en apportant une touche d’espoir et surtout une douceur qui contrebalance le piquant du monstre.

Le succès de Godzilla Minus One a été tel qu’une suite, largement suggérée à la fin, était inévitable. Il semble que l’équipe sera conservée et les producteurs ont indiqué vouloir prendre leur temps pour avoir une bonne histoire à raconter. Tant mieux et même si je suis un petit peu inquiet, j’ai bon espoir que ce soit à la hauteur de ce premier film qui a visé juste. On verra bien si c’était un heureux accident ou le début d’une grande saga.

Informations

Titre original : ゴジラ-1.0

Année : 2023

  • Nationalité :
  • Japon
  • Genres :
  • Science-Fiction
  • Horreur
  • Action

Durée : 2h05