Essia, Wajdi Riahi Trio
Découvert par hasard suite à une recommandation sur Mastodon, Essia m’a d’abord intrigué par « Opening », son premier morceau qui débute sans notes de musique, avant de faire progressivement place au piano, annonçant au passage l’ambition du projet signé Wadji Riahi Trio. Je le découvrais par la même occasion et j’ai écouté l’album sans rien connaître à son sujet. En débutant avec un enregistrement de la Médina de Tunis, évocation de l’enfance du pianiste qui vit et travaille désormais en Belgique, ce premier titre fait en réalité office de programme. Tisser un lien entre les deux cultures, c’est en effet l’idée des dix morceaux qui suivent.
Le deuxième album sorti sous ce nom se construit sur la base d’un trio de jazz contemporain tout ce qui est plus classique, ce qui n’est pas une critique. En plus de Wadji Riahi derrière le piano, on retrouve Pierre Hurty aux percussions et Basile Rahola à la contrebasse et ils imaginent des compositions modernes et que je trouve déjà très réussies et qui suffiraient à composer un bon ensemble. La véritable particularité du trio se retrouve toutefois dans l’inclusion de l’univers du pianiste, en particulier de son enfance tunisienne. Par les sonorités et surtout par le chant qu’il procure lui-même, Wadji Riahi parvient à créer un nouveau genre, à mi-chemin entre le jazz et la musique nord-africaine, un exercice qui me plait toujours autant et qui est ici parfaitement maîtrisé. Cela ne ressemble jamais à un assemblage forcé de deux cultures qui n’ont rien à voir et on ne passe pas brutalement d’un univers à l’autre. Il s’agit bien plus d’un dialogue entre les deux, un échange qui mène à un nouvel univers propre et passionnant. « Road to… » est un bel exemple de ces conversations, avec la voix du pianiste qui se superpose naturellement aux trois instruments classiques du jazz. C’est vrai à travers tout l’album, de façon peut-être plus subtile, notamment dans les compositions même qui s’inspirent et jouent avec les rythmiques africaines, à l’image de l’excellent « Hymn To Stambeli » qui invoque les deux cultures en mode instrumental.
Après plusieurs dizaines d’écoutes, Essia conserve sa place dans ma rotation quotidienne et c’est un album que j’apprécie tout particulièrement. Un coup de cœur que je recommande sans hésiter.